C'était il y a excatement 40 ans, en décembre 1976.

Brrr ! Cet aprèm' il fait un peu frisquet, aussi pour me réchauffer je m'arrête à la Taverne, on se raconte nos virées,
moi, c'était il y a exactement 40 ans en décembre 1976.

Je venais de finir mes études et mon service militaire fin juillet 1976, et avais trouvé un emploi en région parisienne.
Quelques payes plus tard, j’acquis enfin en octobre une moto BMW dont j’avais tant rêvé jusque là. C’est dans le magasin de Jean Murit à Paris (ancien pilote dont certains se rappelleront) que je dénichais une superbe R60/5 d’occasion, de couleur bleue.




A peine prise en main, dès décembre, je pars pour l’Angleterre, à Leicester exactement, passer les fêtes de fin d’années chez ma sœur, soit une virée de 630 km aller.
Il est 6h00 du matin, et le récit commence. Levé tôt et parti tôt, les petites routes de l’Oise toutes noires et remplies de brouillard me mettent déjà dans l’ambiance. Ensuite autoroute du nord et direction Boulogne-sur-Mer. Là, c’est la pluie qui m’accompagne. Il n’y a pas beaucoup de monde, on n’y voit rien, mais les traces laissées sur la chaussée mouillée (pour ne pas dire détrempée) m’avertissent que je rattrape une voiture. Ah ! Ce beau pays où il pleut entre les averses.

Arrivé à Boulogne sur mer, la compagnie maritime m’explique que les ferrys n’embarquent plus de motos car trop de problèmes d’assurance avec les rétroviseurs cassés lors des chutes dues à la mer formée. Merci ! Direction Calais pour trouver un autre bateau. Ici, ça marche pour les motards ! Aller savoir ? Je rencontre un motard qui se rend à Rugby, la ville du ballon ovale, il va passer les fêtes chez ses copains anglais en 500 Honda. Un petit-déj’ ne nous ferait pas de mal ; aussitôt dit, aussitôt avalé. Vous l’avez peut-être déjà compris, la météo n’est pas au rendez-vous, et en mer, ça tangue fort, … le petit déj’ aussi. Vite sur le pont, pluies froides et embruns glacés sur la figure nous remettent à l’endroit. Ouf !

Mon compagnon de rencontre souhaite acheter du whisky détaxé pour ses copains british et faire des provisions pour les fêtes. Ben ! Moi aussi pourquoi pas ? Le temps de ranger les bouteilles dans les sacoches le bateau est en approche de la côte. Démarrage des motos, vroum ! vroum ! , et …… une douanière nous fait signe de nous garer. Quoi qu’est-ce que c’est ? Elle baratine en anglais, on fait exprès de pas comprendre qu’on a dû acheter plus de bouteilles qu’il n’est autorisé. Elle nous emmène dans un bureau, où elle nous montre la loi anglaise traduite en français (malin les rosbifs). On fait les étonnés. Ah bon ! On n’a pas le droit de prendre 4 bouteilles chacun ! On fait comment la fête alors ? On paye les taxes et amandes après une heure de perdue. C’était mon premier contact avec les p’tites anglaises, je ne les voyais pas comme ça. Puis l’autoroute ; comme ils (les anglais) roulent à gauche, le plus simple est de se caler complètement  à droite et de rouler bon train, comme ça pas de problème (même sous la pluie).

Arrivé à Londres, ça se complique. Eh oui ! Eux aussi ils partent pour les fêtes de fin d’année, alors je ne vous raconte pas le trafic jam  (bouchon en anglais). Mais heureusement, mon compagnon connaît un raccourci, …. qui ne nous fera pas perdre plus d’une heure trente.
Enfin on sort de Londres, les bouchons aussi, et on prend tous les deux l’autoroute pour le nord vers Leicester et Rugby. Ici, les départs en week-end ou en vacances ce n’est pas "plus pire" que chez nous.

Au bout de quelques km, il me fait signe qu’il a soif (tu m’étonnes avec toute cette flotte, ça donne soif !). Moi, je suis toujours partant pour une bonne bière, surtout une bière anglaise, on trouve une aire de service. Eh ben non, ils ne vendent pas d’alcool dans les stations. On se rabat donc sur un orange juice ; ça n’a pas le même goût, et dire que je rêvais de goûter leur fameuse bière.
Sitôt avalé j’essaye de démarrer le flat. Tiens il y a comme un problème ! Diagnostic : c’est tout bloqué  (!), le kit aussi est bloqué, est-ce la boîte ? Je n’ai jamais su ce que c’était, mais au bout d’une bonne demi-heure à force de brandouiller la roue arrière dans tous les sens (en fait il n’y a que deux sens de rotation possibles), tout se débloque. Démarreur électrique, vroum ! vroum ! Oui, ça c’est le bruit du flat, mais tout le monde l’avait reconnu. Par contre sa Honda, elle fait vroumm ! vroumm ! C’est pas pareil quand même. On reprend l’autoroute et la pluie nous reprend aussi, et les bouchons avec. Je ne me souviens pas qui a eu la bonne idée de prendre la BAU (Bande d’Arrêt d’Urgence), mais c’est vrai que ça roule nettement mieux. On se tape un bon 100 km/h, et on laisse les" caisseux british" se traîner dans les bouchons (bien fait), nous on roule, et ça fait du bien.


Une grande courbe, et en sortie de cette courbe, on aperçoit un "policeman" qui me fait signe. Bizarre, moi je ne le connais pas ce gars-là, d’ailleurs je ne connais personne ici, il a peut-être besoin de quelque chose, alors on s’arrête. Lui aussi, il baragouine en anglais, il n’a pas l’ait d’être content (moi non plus), je sens que l’on va encore perdre du temps.
Puis soudain pour faire diversion, je lui montre la carte et les villes de Leicester et Rugby, et lui fais comprendre que l’on est un peu perdu. Alors, soudain avec un grand sourire et tout plein de gestes il nous explique qu’il faut aller tout droit (comme si on pouvait faire autrement sur une autoroute !), et puis tourner je ne sais plus où. Ils sont symphas quand ils veulent. Alors on démarre vite sans demander notre reste en les remerciant quand même. Ouf ! Mais, on a encore perdu pas mal de temps, je ne sais pas quelle heure il est, je vis sans montre et en plus je ne sais pas dans qu’elle fuseau horaire on est, mais ce que je sais, c’est qu’il fait nuit depuis un moment déjà.

On se sépare comme prévu, et chacun suit sa route. Il pleut toujours. Je commence à sentir le froid. En fait je suis complètement trempé, la combinaison caoutchouc acheté d’occasion ne doit être plus étanche qu’un kleenex.
50 miles, 40 miles, 20 miles, enfin 10 miles et je touche au but. Puis soudain, bizarre, la moto bagotte dans tous les sens, surprenant  pour une routière. Je comprends vite que le pneu arrière est crevé. Je ralenti et stabilise la moto. Il doit rester environ 10 kms maintenant. J’hésite. Finalement, je décide de ne pas m’arrêter, pour quoi faire d’ailleurs. Il fait nuit, il fait froid, je suis trempé, j’en ai marre, pas envie de parler anglais, ça tombe bien, il n’y a personne dehors, pas envie de réparer, de toute façon je n’ai pas les outils.
Et, j’arrive tant bien mal à destination.
Douche, bière, whisky, la fête commence.

Epilogue :
Et le retour me demandez-vous ? Tout s’est bien passé, sauf que les pompistes en France étaient en grève. Heureusement, je m’arrête dans une Gendarmerie et un gendarme m’emmène à une station ouverte ou réquisitionnée.
 
Le mot de la fin : Si vous partez loin, partez tôt.

Chouette conte de Noël et en plus ça donne envie d'aller découvrir l'Angleterre. ;-)
Félicitation aussi pour tes dons de marabout désensorcelleur de boite de vitesses, as tu essayé de les développer?

What else ... que du bonheur, ce récit. Et tellement vécu par la plupart d'entre nous ...

Merci pour ce récit bien sympathique

Ouais, jolie histoire!
'tain, décembre 76, j'avais même pas 9 ans...

sympa le récit, plus besoin de s'arrêter à Boulogne, il n'y a plus de ferries...  
pour la bière tiède je crois que tu n'as rien perdu...

Une belle balade comme nous en faisions quand nous étions fous.

J'ai aussi acheté ma R60/5 d'occase en 1976 (je l'ai toujours) j'ai eu l'occasion d'aller parfois chez J Murit pour de la pièce quand j'habitais Chatou. Et maintenant dans notre club de balades en vieilles à Béziers je côtoie et roule régulièrement avec celui qui était son singe quand il a été champion en side en 1953 je crois, ce gars-là, Francis Flahaut, à été vice champion de France et champion du Maroc sur Manx à la même époque.

Mes grandes virées à moi c'était pour trouver ma dulcinée tous les week-end, une montpelliéraine exilée en Mayenne, les motos étaient encore assez rares.

Récit très sympathique... merci !
En 76 à 14 ans je regardais les gars comme toi avec leur Barbour authentiques et graisseuses et je rêvais à ma future moto..

BravoFox a écrit:Récit très sympathique... merci !
En 76 à 14 ans je regardais les gars comme toi avec leur Barbour authentiques et graisseuses et je rêvais à ma future moto..

J'en avais 15 , je m'éclatais sur mon Honda PS50 à 3 vitesses ( s'il vous plait...) et il y a un terminale qui avait un 90 S dégradé orange   ( je ne savais pas à l'époque que je dirais "daytona" un jour)...

Chouette histoire humide.....

J'avais eu une panne un peu similaire sur une Triumph. En fait c'est un morceau de boisseau de carbu qui était allé se coller sur un piston. Du coup il bloquait un peu une soupape. Mais à force de bouger la roue arrière dans tous les sens, il avait fini par laisser passer la soupape, et je l'avais sorti de la calotte au retour.

Les bécanes récentes nous laissent moins de souvenirs.......

Francesco a écrit:

Les bécanes récentes nous laissent moins de souvenirs.......

Désolé si je l'aime bien et si je la répète:

Les vieilles bécanes nous ont laissé les "souvenirs" et les bécanes récentes nous laissent ....."les sous partir"..


....avec nos maîtresses ça marche aussi.

C'est joliment dit.....

1976 , une R65/5 bleue . Que de souvenirs resurgissent en moi .
Je n'ai pas été voir les Britons , mais assez souvent les Teutons , ou il y avait de la bière partout  
Et aussi ma copine qui était motarde . Elle était de Dijon ...... la motarde de Dijon " tout le monde connait  
Joli récit très bien narré .
Merci

1976 ...j’étais en 125 GT Suzuki , bon freinage ,  bel éclairage , et belle consommation , pour la BM c'est arrive trois ans plus tard mais j'ai encore ( et pour toujours ) ma R 75/6 , ceci dit beau récit et incroyable mémoire , perso tout ce que je me souvient de Décembre 76 c'est qu'il y avait noël

Merci de ce compte rendu qui réactive quelques bons vieux souvenirs .  

Didier a écrit:Merci de ce compte rendu qui réactive quelques bons vieux souvenirs .  

+1
ça me rappelle des vacances chez les perfides où il avait tellement plu que la tente était moisie au retour

76 C'est l'année de mon permis moto (ça faisait six ans que je roulais en Honda 125 S) et que j'ai acheté ma 50/2 toute a remonter...  

Belle mémoire, et belle narration... 

bravo, belle histoire, nostalgie, quand tu nous tiens, en 76, la sécheresse, et moi sur un malagutti 50, boite 4 vitesse, double sortie d'échappement, modèle "olympic"  je crois, je taillais déjà la route

Joli récit, jolie balade ... Décembre 76, mes 18 ans approchaient ... 

Ton aventure m'a rappelé des souvenirs aussi. Deux virées au TT sur une R50/5 ....Effectivement traverser l'Angleterre sous la flotte, c'est très long ! Moi, c'était en juin, donc la nuit arrivait plus tard, c'était  mieux !

Salut les sexagénaires et ceux pas loin!

1976... l'année de la sécheresse!
Je sillonnais la France dans tous les sens avec ma Suzuki 125 TSA orange.

En fin d'année, j'ai acheté ma R75/5, que j'ai toujours (mais repeinte en blanc). Je n'avais pas encore le permis, mais qu'importait: je réalisais un rêve! 
C'était soit elle soit une Guzzi V7 S3 à bande verte. Mais je n'en avais pas trouvé à l'époque.
Permis obtenu en juillet 1977...

1976 !!

Belle histoire beaux souvenirs,

ca ne nous rajeuni pas mais ca fait du bien,

tiens pour énerver ta mémoire, une photo du dedans du ferry Calais Douvres en aout 1975

Beau récit.

Alfred, vous étiez tous hipster en 1975.


Bonne année plein de kilomètres à moto pour 2017 pour tous.